Retour à Erquy

Category: Editoriaux, Vie de l'institut 61

nguyen_phu_nhi.jpgL’idée trottinait dans ma tête depuis plusieurs mois. Depuis la date où j’ai reçu l’invitation au mariage d’un cousin, à Lamballe, avec la liste des hotels dans les environs. Lamballe, arrêt TGV pour aller à Erquy situé à une vingtaine kilomètres. Erquy, rien que le nom, m’a donné des frissons d’émotion, m’a évoqué tant de souvenirs.

 Pour l’heure, j’ai du choisir entre une nuit à Lamballe, où une nuit à Erquy, Après consultation auprès de  ma femme, nous avons opté pour Erquy. Il fallut dire que nous avions aussi des souvenirs en commun à Erquy.

Des images défilaient rapidement devant mes yeux. Et l’image de la maison Notre Dame s’est arrêtée longuement. Je me donnai pour mission d’aller me retrouver au milieu de cette ville, de ses contrées, de ses plages de ses habitants, de ses commerces, de cette maison.

 Par où commencer ? Si quelqu’un a eu la chance d’avoir une maison secondaire familiale où aller chaque vacance, celui comprendra toute mon émotion, mon amour pour Erquy.

1.jpgRetournons dans le passé, entre 92 et 2000

Erquy, c’était les vacances de rêve, pour nous. Que de souvenirs ! Le jour de réussite au bac de Binh (notre premier bachelier de Maison Marcel Van), nous visitions une pigeonnière dans les environs d’Erquy, Tonton ayant reçu la nouvelle par téléphone, courra nous l’annoncer, le soufle entrecoupé. Nous étions tout en haut de la pigeonnière, Tonton a du courir et grimper très vite. LA maison Notre Dame, nous étions les pionniers dans cette maison. Il a fallu tout défricher, débarasser les objets encombrants. Avec Monsieur Phan, nous sommes allés acheter de la moquette, des revêtements muraux, des sanitaires et pendant les premiers jours de vacances, nous avons travaillé, beaucoup pour remettre la maison en état. Du rez de chaussé au comble sous toit. Tout a été revu, repeint, retravaillé.

Les travaux s’étalaient sur quelques années. Tonton installe une escalier extérieur tout neuf pour avoir une sortie de secours comme prévoit la loi.

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Somano, un grand frère laotien a repeint la statue de la Sainte Vierge. La cuisine a été rabaissée à la hauteur de ma tante. Les aides affluaient, les gens nous donnaient du temps, du matériel, des œufs, des plats. C’était très joyeux. Les jours de marché, on nous reconnaissait dans la rue, et nous saluait toujours avec une phrase gentille. On a doublé les murs dans la salle à manger, pour bien isoler la chaleur d’une cheminée. C’était notre quartier général. La prière du soir devant le feu, les repas, les jeux, la lecture, les veillées devant la cheminée durant l’hiver pour surveiller le feu. Dans cette maison, il y avait aussi la salle au piano, où nous revisitions nos classiques du rock, de la variété française. Autour de nous, il y a les sœurs, et Mme Annick, qui s’oocupe de l’église en contre bas. Nous étions un peu ses petits neveux et nièces.

  

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Nous avons installé, quelques années après, des douches à l’extérieur pour les retours de plage, des congélateurs récupérés pour stocker nos réserves. Il fallait dire que la maison tournait, il y avait des jeunes en vacances, de passage dans la maison. Nous sommes devenus le petit bout d’Asie du Sud Est à Erquy, nous étions heureux. Les activités étaient nombreuses, les ventes des articles au profit de l’association sur la plage, la collecte des dons à l’Eglise, la marche nocturne au clair de lune et au flambeau au profit de l’association.

Je suis ivre de joie, et parle sans cesse, expliquant à mes enfants ce que je faisais d’ici et là avant. J’espère que la maison Notre Dame n’a pas changé depuis sa fermeture décidée pas la nouvelle direction de  l’association Enfants du Mékong.

Me voilà, devant la maison, dont le portail est fermé par un gros cadenas. Cadenas qui emprisonne désormais tous mes souvenirs de vacances, avec ma tante, mes amis, mes frères de Marcel Van, et puis les souvenirs de Pierre Rivière, de ma femme, de mon fils aîné. Cadenas muet, sans âme, qui ne racontera plus le bonheur des gens vécu dans cette maison Notre Dame.

Je ne m’avoue pas vaincu, je veux connaître l’état de la maison, de la chapelle, je me suis allé frapper à la porte de Mme Annick. Je n’ai pas eu le temps de frapper, entendant les pas dans son escalier, elle a ouverte la porte. Me voyant, elle m’a dit « Quelle surprise ! Mais c’est Pierre, où sont ta femme et ton fils ? » Mon Dieu, des années après elle se souvient encore de mon prénom et ma petite famille.

parking
 
Cour
L'entrée
 

LA maison Notre Dame est devenue inoccupée, l’herbe a poussé, les ronces ont eu raison de la cour, et de l’escalier, et de la douche et des murs, et de tout, cachent la Sainte Vierge également. Les pans de murs ont tombé à l’intérieur. Un pan de plafond est tombé sur le piano. La maison Notre Dame est dans un état pire que la première fois nous sommes arrivé ouvrir sa porte avec pleine d’espoir et d’entrain. Je sens qu’elle meure petit à petit. Avec tous nos souvenirs. Mme Annick m’a confié qu’on va la détruire et bâtir quelque chose autre à la place.

rez de chaussée
Cour

 

Escalier

 

Escalier

 

Cour
Parking

 

Je reste sans voix, tout devient flou. Désormais, nous n’aurons que le récit pour nos enfants.

 

NGUYEN Phu Nhi

 

 

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